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Démarche
Cette
année, j’ai fait le choix de proposer aux 23 élèves de ma classe de CP des
temps de production libre. L’idée motrice est de favoriser l’exploration et
l’expression dans le domaine des arts visuels en imposant le moins de contraintes
possibles
En début de séance, je demande simplement aux enfants ce qu’ils souhaitent faire. Nous nous mettons d’accord sur une répartition du matériel susceptible de contenter le plus grand nombre et la séance commence. Nous faisons une séance hebdomadaire d’une heure trente environ. Liberté est donnée aux enfants d’utiliser l’ensemble de ce temps en arts visuels ou bien de glisser vers une autre activité en cours de route (« coins », projet personnel, lecture …). Sauf rares exceptions, tous réalisent au moins une production et une majorité doit être stoppée avec énergie pour engager le rangement. Durant le temps de production, mon rôle est de gérer les questions matérielles et d’aider les enfants à réaliser leur projet du jour. J’essaie également de montrer de l’intérêt pour le travail de chacun : « explique-moi ce que tu es en train de faire ».
Au bout
du temps imparti à la production, nous rangeons la classe et passons au temps
d’exposition (10 à 15 minutes). Les enfants déposent leur travail à leur place
et vont observer les autres productions. Ils peuvent également fournir des
explications sur leur propre production. Ceci permet une circulation des idées
et des techniques au sein de la classe et des échanges valorisant.
Au début
de l’année, j’ai ressenti le besoin d’alterner ces temps de création libre avec
des séances de découverte de techniques simples (crépon mouillé, encres soufflées,
craies grasses et encres, découpage-collage, drawing-gum, papier mâché,
différentes manières de peindre…) et des moments de présentation du matériel
disponible dans la réserve de la classe. Ceci a permis aux enfants de
s’approprier et d’imaginer différentes solutions d’expression. Le matériel à
disposition est très banal et correspond à ce que l’on peut trouver dans
n’importe quelle école.
Bilan
Mon
principal problème reste l’organisation matérielle de la classe. D’une part, le
matériel d’arts visuels est stocké dans une haute armoire ; il est peu
accessible aux enfants et je dois sans cesse le sortir et le ranger moi-même.
D’autre part, le maintien de la propreté a été très difficile tout au long de
l’année : les bidons de peinture éclaboussent, les pots se renversent, les
enfants se déplacent avec des productions dégoulinantes, la colle liquide sèche
et ne part qu’au grattoir, la craie grasse marque au sol, l’encre tâche les
tables… etc. Malgré la répétition permanente des consignes de prudence, rien
n’y fait. Pour les mêmes raisons, j’ai dû fermer le « coin création »
installé pour faire des arts visuels durant le plan de travail.
Je
rencontre également des difficultés à tisser des liens entre les productions des
élèves et les œuvres du patrimoine. Ma modeste culture artistique n’y suffit
pas et le temps (la motivation ?) me manque pour me lancer « à
l’aveugle » dans des recherches picturales. Dès lors, les échanges au sein
du groupe dépassent rarement l’aspect technique de la production étudiée. Ici
se pose la question de l’existence d’outils permettant d’établir facilement des
références, si possible accessibles aux enfants.
Mais pour
l’essentiel, je tire un bilan très positif de cette année en arts visuels. Les
enfants ont montré un grand enthousiasme et beaucoup de plaisir à produire
librement et ensemble. Je considère que certains d’entre eux ont vécu des expériences
de création véritable ; c’est-à-lorsque la technique et le matériel se
mettent au service d’une expression de la personnalité profonde. C’est le cas
de C., agitée et torturée, qui a introduit d’elle-même et avec beaucoup de
succès la technique des projections de peinture dans la classe. C’est aussi R.
dont la luge fonçant sur un sapin a
fait forte impression et révèle sa formidable force de vie. Bien sûr, ce
ressenti et ces interprétations sont totalement subjectifs ; ils n’en sont
pas moins porteurs et m’incite à poursuivre l’expérience des production libres.
Finalement,
cette manière de travailler m’a permis de découvrir le dynamisme, la diversité
et la richesse de l’expression libre des enfants. Elle peut être mise en place
sans compétence particulière de la part de l’enseignant et permet à l’enfant de
produire quelques soient ses habiletés et sa créativité. J’en retire donc une
grande satisfaction.